Togocultures : Monsieur Fiangor Koffi Rogo, vous ne communiquez pas beaucoup sur vos activités et pourtant vous faites des choses diverses et
variées, les unes aussi intéressantes que les autres. Pouvez-vous vous confier un peu à Togocultures. ?
Rogo Koffi Fiangor :
Oui, qui peut résister à une demande si gentiment formulée. C’est vrai que je ne communique pas beaucoup faute de temps et d’occasions réelles. Mais j’ai un blog sur lequel je m’efforce
de consigner l’essentiel de ce que j’entreprends, donc tous les amis, connaissances et relations avec qui je communique ont tout le loisir de suivre l’essentiel de ce que je fais. Mon
métier de conteur et de conférencier est actuellement bien ciblé et bien focalisé sur les questions de tradition, d’éducation et de développement en Afrique. Les demandes qui m’arrivent
concernent ces domaines. Et avec Les contes africains et universels, je parcours établissements et bibliothèques avec toujours le même objectif : contribuer à distraire, instruire et
éduquer.
Togocultures : Justement, vous rentrez de Fort de France en Martinique. Pouvez-vous nous développer un peu l’expérience que vous avez vécue en
Martinique ?
Rogo Koffi Fiangor : Oui, la Martinique fut une belle expérience ! Les mêmes températures qu’au
Togo, des paysages sublimes, la mer, ses différentes couleurs et ce peuple à la fois coloré et complexe. Un petit séjour ne suffit pas pour aller en profondeur des choses et je rêve d’y
retourner pour un projet de résidence d’écriture. Pour le Festival auquel j’ai participé «Contes et Musique dans la Cité 3ème
Edition» ce fut un rendez-vous plein de charme et de dynamisme. J’ai découvert là-bas le combat d’une structure «Virgul’» qui se démène pour que la culture du conte et de l’oralité aille à la rencontre des populations. Un vrai combat ! Valer’ Egouy,
le responsable, embrasse dans ce combat plusieurs domaines socioculturels, artistiques, sportifs, ce qui est assez varié et globalisant. On apprend beaucoup en donnant aux autres dans ce
genre de manifestations. J’ai été raconter dans plusieurs établissements scolaires, fait plusieurs médias et des rencontres personnelles très enrichissantes. Entre deux racontées,
j’ai donné une conférence à L’Atrium qui est vraiment un haut de culture, placé sous le regard d’Aimé Césaire. Le thème était «La
place des conteurs et des griots dans la tradition orale africaine». Belle réception de la part du public présent ! Après cela, j’ai par exemple visité une
exposition de Philippe Monges : «Lieux de mémoire, Mémoire des lieux, sur les traces de la traite négrière et de
l’esclavage.» Avec la chance de discuter avec la médiatrice de cette émouvante exposition. Cela a fait germé dans mon esprit plein de projets pour l’avenir. Je dois y
retourner !
Togocultures : Le seul festival de contes en Ile de France durant ce mois de juin, (source internet) c’est le rendez-vous des «menteurs et diseurs de vérité». Quelle sera votre participation à ce Festival ?
Rogo Koffi Fiangor : « Le Festival des menteurs et diseurs de vérité »
est à sa 3ème édition. Après les rendez-vous de 2005 et de 2007. Cette initiative a une genèse qui remonte à 2002, à l’époque où je racontais dans le Restaurant de l’APAAC (Association
pour la Promotion. Artistique et Culturelle). Petit local où les spectateurs s’entassaient plus que dans une boîte de sardine. Il fallait faire quelque chose pour sortir de ce lieu qui
connaissait un succès de plus en plus grandissant. On a pensé, sur la proposition de plusieurs personnes, d’élargir les racontées à d’autres lieux de la ville. Un projet est né qu’on a
soumis au Service Culturel. Evelyne Biribin, la directrice, a bien accueilli la suggestion, l’a amendée, a mobilisé tout le personnel de son service sur le coup… et nous voici à la
troisième édition. J’ai été partie prenante de toutes les éditions en tant que Directeur artistique. Je vais en amont écouter les conteurs et je suggère la programmation, au service
culturel, en essayant de créer un lien cohérent entre toutes les éditions. A la première édition en 2005, nous avions eu 6 dates. En 2007, à la deuxième édition, 12 dates avec des
racontées dans les bus de la ville. A cette troisième édition, nous avons 11 rendez-vous. Et c’est formidable d’inviter ainsi 11 comédiens, conteurs et musiciens pour un festival où les
habitants sont gracieusement invités. Il y aura là entre autres Teresa Amoon, Gabriel Kinsa, Sylvain Mehoun, Saïdou Abatcha, Adama « Taxi Conteur »… pour ne citer que ceux-là.
Le programme complet est sur www.fontenayenscenes.org. Seul le ciné-conte est payant à cause du cinéma… C’est tout simplement génial ! Et
j’espère qu’il y aura une édition en 2011 puis en 2013,… pour respecter l’espacement biennal de cette programmation.
Togocultures : Depuis quand exercez-vous ce métier de conteur, quelles sont vos motivations et comment vous sentez-vous dans ce
travail ?
Rogo Koffi Fiangor : Depuis un bon moment déjà ! Ma motivation première est d’apporter la culture
africaine aux populations d’ici en France et en Europe en laissant de côté tous les stéréotypes et les idées reçues qui empoisonnent et emprisonnent les opinions véhiculées sur l’Afrique
par les médias. Surtout la télé. C’est en même temps comme seul, ou en nombre très réduit, vouloir affronter de ses bras un train de 400 à 1000 tonnes. Les chances sont maigres mais là où
nous passons, même si on n’arrive pas à effacer toutes les ignominies, on sème la vérité de la bonne parole. Et cet engagement là vaut et le détour et le sacrifice ! Car, il y a dans
ce travail aussi des périodes de soudure et de vaches maigres, parfois désespérantes. Je me sens bien dans l’emploi mais l’enseignement en lycée, en tant que professeur d’expression
théâtrale et artistique, comme j’avais eu à le pratiquer en 2004-2005 me semble plus mobilisateur... Parce que là, on travaille en profondeur avec un groupe qui peut être relais plus
tard !
Togocultures : Quels sont les projets futurs dont vous aimeriez nous parler ou que vous aimeriez partager avec nos lecteurs ?
Monsieur FIANGOR K.R. : Trois projets me tiennent vraiment à cœur actuellement. D’abord réussir à
décrocher le mois prévu en 2010 à Montbéliard pour faire un « Pleins feux culturels sur le Togo » et
aussi faire en sorte qu’à travers les synergies qui naissent de nos différents contacts, et c’est là le 2ème projet, qu’il y ait plus de correspondances scolaires entre les élèves d’ici
et ceux du Togo ou d’Afrique de l’Ouest, et des projets de jumelages entre des villes de France et d’Europe et des villes du Togo. Mon 3ème projet répond à une ambition
expérimentale : réussir la mobilisation déjà engagée des anciens élèves des Collèges Protestants du Togo au sein de l’Association Col Pro Diaspora dont je coordonne les activités
avec plaisir. Ces trois projets ne sont pas directement liés à mon activité de comédien-conférencier-conteur. Mais ils en sont des ramifications. S’ils aboutissent, un tant soit peu, j’en
serai très heureux.
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